Albédo optimal : toit blanc ou toit vert ? 

Table des matières

L’albédo mesure la capacité d’une surface à renvoyer les rayons réfléchissants. Une surface noire a un albédo nul et emmagasine trop de chaleur l’été. Résultat : la solution consistant à repeindre les toits en blanc pour renvoyer le rayonnement solaire et lutter contre les îlots de chaleur s’impose comme une évidence. Est-ce si simple ?
Et si c’était une fausse évidence ? Et s’il fallait aussi tenir compte …. de la pluie ?
Commençons par un petit quiz, en deux questions. 

Toit blanc et albédo : l’évidence même

Lorsqu’il fait chaud l’été, la première chose à faire, c’est de s’habiller avec : 

a- un vêtement clair

b- un vêtement noir

La bonne réponse est a) et cela est très connu. Pour une toiture, c’est la même chose. La réponse est évidente. Bien sûr qu’on va privilégier les couleurs claires. Même à Paris. Selon l’Apur qui a créé une base de données sur les toits de Paris, 52% des toitures parisiennes (19, millions de m2) ont déjà un albédo élevé.
Autrement dit, les toits de Paris savent déjà assez bien s’habiller l’été. Ils sont beaucoup plus clairs qu’on ne pourrait le supposer a priori.

Pourtant Paris est considérée comme une des villes où l’impact des îlots de chaleur est le pire parmi les autres grandes villes (90% des Parisiens étaient exposés à une différence de 3 à 6°C et 10% à plus de 6°C en 2021).

Comment comprendre cela ? Poursuivons le quiz.

Deuxième question du quiz. Où fait-il le moins chaud l’été quand la météo annonce 30°C ? 

a- sous un parasol blanc sur une plage de sable sans vent ?

b- sous un tilleul dans un jardin ? 

Vous avez répondu b, n’est-ce pas ? C’est que le tilleul agit comme un “climatiseur”, à la différence du parasol blanc. Ceci explique donc cela. La couleur ne fait pas tout. Il faut tenir compte d’autres facteurs qui contribuent à l’effet “climatiseur”.

albédo toit blanc à Paris : effet four de la réflexion
Les rayons du soleils se reflètent d’abord d’une surface minérale à l’autre.

Albédo élevé et îlot de chaleur : les autres surfaces.

Premier facteur : la réflexion. La densité des villes, et tout particulièrement à Paris, fait que la lumière, même renvoyée par une surface à fort albédo, se réfléchit bien souvent sur une autre surface : le mur d’un immeuble qui fait face, la surface en verre d’une autre façade, un trottoir totalement minéralisé, etc. La chaleur réfléchie reste donc dans la ville ! 
Quant à celle réfléchie directement par un toit plat : elle devrait faire office de “retour à l’envoyeur direct” et épargner au moins de sa rigueur les habitants du dessous à due proportion de la surface qu’elle recouvre, non ? 

Pas totalement. Il faut aussi compter avec les phénomènes de convection.
Lorsqu’il fait très chaud l’été, l’air chauffé par la ville s’élève, se dilate et devient alors plus léger que l’air froid. En montant, il se refroidit et retombe. Mais il n’est pas aussi frais que l’air frais alentour, à la campagne la nuit, par exemple. C’est ainsi que se crée un dôme au-dessus de la ville, à l’intérieur duquel les masses d’air se déplacent dans un mouvement ascendant puis descendant, comme votre chauffage central l’hiver, en entretenant donc de l’énergie calorique dans le système. 

Deuxième facteur : la présence de végétal .



Cette autre information est également très connue : plus la ville possède de végétaux (jardins, allées d’arbres, etc.) moins la chaleur qui y règne est suffocante. C’est l’effet “tilleul contre parasol” de tout à l’heure. 

C’est que la végétation dispose du pouvoir d’évapotranspiration.
Elle stocke l’eau de pluie et la restitue lentement ensuite. Elle transpire. Or, pour réussir cela, elle consomme des calories. Exactement comme votre réfrigérateur ou votre climatiseur. Résultat : sous le tilleul, il se consomme beaucoup de calories et il fait effectivement plus frais : un phénomène anti-réchauffement parfait.
Moins il y a de végétaux en ville, plus la terre est recouverte et imperméabilisée, moins ce deuxième facteur joue. Or, il est prépondérant dans la lutte contre les îlots de chaleur. 

Après le beau temps, vient la pluie… même sur un toit blanc 

Allez, une petite question bonus..
En général, quelle est l’étape suivante la plus probable, après une grosse canicule ? 

a- une diminution douce des températures en mode “le printemps revient” 

b- un gros orage

Là encore, vous avez répondu plutôt b. Votre expérience de ces situations a parlé. Ainsi que les informations sur le changement climatique et l’évolution du régime des pluies qu’il provoque. Et l’image qui vous est venue à l’esprit est alors celle de trombes d’eau et de forts ruissellements dans les rues, voire d’inondations.

Après le beau temps vient en effet la pluie et si celle-ci est forte, ce que l’on appelle le débit de fuite, autrement dit ce que les tuyaux des réseaux d’eau pluviale vont recevoir, dépend aussi de la nature des toitures et de leur albédo !

Paradoxalement, les effets qui se cumulent agissent en sens opposés. Quand la pluie tombe sur un toit chauffé à blanc d’avoir accumulé de la chaleur (toits à faible albédo), l’évaporation de la pluie sera plus importante, cela limitera le ruissellement.
Quand la pluie tombe sur un toit blanc, cela amplifiera le ruissellement.
Quand la pluie tombe sur un toit végétalisé, l’eau sera absorbée par la végétation et le substrat. Cela limitera le ruissellement jusqu’à la saturation. 


Globalement cependant, l’avantage va au toit vert, c’est-à-dire au toit végétalisé.

L’albébo du toit vert.

  – Les toitures végétalisées avec des substrats épais et des plantes à faible albédo (comme les sédums) peuvent absorber et retenir une grande quantité d’eau, réduisant ainsi le débit de fuite. Cependant, si le substrat est saturé, le débit de fuite peut augmenter ensuite.

  – Les toitures végétalisées avec des substrats clairs et réfléchissants peuvent rester plus fraîches, mais leur capacité de rétention d’eau peut être affectée par une évaporation réduite.

  – Les toitures non végétalisées avec un albédo élevé (comme les toitures blanches) réfléchissent plus de chaleur, ce qui peut réduire la température de surface et potentiellement augmenter le débit de fuite si l’eau n’est pas évaporée efficacement.

  – Les toitures sombres avec un albédo faible absorbent plus de chaleur, augmentant l’évaporation et réduisant ainsi le débit de fuite, mais à un coût énergétique plus élevé pour le bâtiment, ce qui est rarement ce que l’on recherche. Les économies d’énergie restent indispensables dans tous les cas.

Conclusion

La lutte contre les îlots de chaleur passe forcément par une gestion équilibrée de tous les facteurs.
Bien sûr, une bonne quantité de toits clairs ou blancs à fort albédo participera à la lutte. Mais à condition d’éviter aussi la réflexion de la lumière et de casser l’effet four. 

Pour cela, seule la végétalisation fait rempart, car elle introduit le facteur “climatisant” essentiel : l’évapotranspiration. 

Quand on entre dans les détails techniques ensuite, il faut pouvoir gérer l’épaisseur du substrat et le type de végétalisation en fonction des contraintes structurelles et des objectifs d’isolation que l’on se fixe, face à l’effet îlot de chaleur. 

Image de Pierre GEORGEL
Pierre GEORGEL

Passionné de botanique depuis son enfance, a transformé son amour pour les plantes en une carrière florissante. Après des études réussies en horticulture et en paysagisme, il a lancé un projet audacieux à 20 ans : un jardin sur le toit du garage familial. Malgré des débuts difficiles, il co-fonde ECOVEGETAL, qui devient en 15 ans la référence en France pour les jardins sur toits et parkings. Une belle histoire d'innovation et de passion transformées en succès entrepreneurial.

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