Évacuation des eaux pluviales et réglementation : ce que tout maître d’ouvrage doit garder en tête

Table des matières

Dans tout projet d’aménagement, la question des eaux pluviales devient de plus en plus critique.

Envisagez-vous de diriger ces eaux vers le réseau d’assainissement ou d’appliquer des méthodes d’infiltration naturelle, de stockage ou de rétention d’eaux pluviales ?

Ou un peu de tout cela dans des proportions à définir ?   

Dans tous les cas, il  est impératif que votre cahier des charges soit en conformité avec la réglementation en matière d’eaux pluviales ainsi que le cadre législatif en vigueur sur le territoire. Toute la question étant : de quel territoire parle-t-on ? En effet, l’eau ne s’écoule pas vers la mer en suivant nos territoires administratifs classiques (départements, régions, etc.).

La gestion de l’eau dispose donc à la fois de sa propre géographie et de sa propre logique réglementaire. Voici de quoi se repérer.

Évacuation des eaux pluviales et réglementation

C’est flou. La politique de l’eau en France repose sur quatre grandes lois, encadrées par la directive-cadre européenne de 2000 sur l’eau.

Et dans le détail pour la France ? La réglementation sur l’évacuation des eaux pluviales est floue. Elle devient de plus en plus stricte, mais elle reste complexe à saisir, et pas totalement contraignante. En gros, depuis la Loi sur l’Eau (1992 et 2006), tout projet est encouragé à limiter l’imperméabilisation des sols. Vous êtes prié(e) de préserver le milieu naturel et la ressource eau.

Une chose, elle, n’est pas floue : l’augmentation des épisodes climatiques difficiles à gérer. Pluies torrentielles annuelles, crues, l’évacuation des eaux pluviales est plus qu’une question de réglementation ! C’est une question de bon sens si vous voulez que votre projet d’aménagement tienne la durée. Et, compte-tenu des risques d’inondation, une question de sécurité publique !

Mais ne négligez pas le règlement sur l’évacuation des eaux pluviales sous prétexte qu’il paraît encore souple… C’est votre projet qui risque d’en sortir perdant ! Vous avez besoin d’aide pour vous y retrouver dans les textes contraignants et non contraignants, d’urbanismes locaux ou nationaux, les textes d’encadrement, etc. ? Voici qui devrait vous éclairer.

La directive cadre européenne (DCE) sur l’eau de 2000 : la mère des règles

La directive-cadre sur l’eau (DCE) a été adoptée par le Parlement européen et le Conseil le 23 octobre 2000 . Elle établit un cadre pour une politique globale communautaire dans le domaine de l’eau. Cette directive vise à prévenir et réduire la pollution de l’eau, promouvoir son utilisation durable, protéger l’environnement, améliorer l’état des écosystèmes aquatiques et atténuer les effets des inondations et des sécheresses.

Les grands principes de la DCE sont : une gestion par bassin versant ; la fixation d’objectifs par « masse d’eau » ; une planification et une programmation avec une méthode de travail spécifique et des échéances ; une analyse économique des modalités de tarification de l’eau et une intégration des coûts environnementaux ; une consultation du public dans le but de renforcer la transparence de la politique de l’eau.

La Directive Cadre sur l’Eau définit également une méthode de travail, commune aux 27 Etats membres, qui repose sur quatre documents essentiels : l’état des lieux : il permet d’identifier les problématiques à traiter ; le plan de gestion : il correspond au SDAGE (voir ci-après) qui fixe les objectifs environnementaux ; le programme de mesure : il définit les actions qui vont permettre d’atteindre les objectifs ; le programme de surveillance : il assure le suivi de l’atteinte des objectifs fixés. L’état des lieux, le plan de gestion et le programme de mesure sont à renouveler tous les 6 ans .

Comment le droit français a-t-il intégré la réglementation européenne et même plus dans ses textes ?

La base de votre planification actuelle sur l’eau, on l’a dit, c’est la directive-cadre sur l’eau DCE (2000/60/CE), du Parlement européen, adoptée en 2000. Dans le droit français, on la retrouve dans la Loi n°2004‐338 du 21 avril 2004 et le Code de l’Environnement. Puis dans la Loi sur l’Eau de 2006, qui s’évente dans différents documents.

Cela donne une liste comme celle ci-dessous. Toutefois, vous constaterez que certains textes donnent des orientations à suivre et d’autres des obligations.

Niveau national

  • Code civil
  • Code de l’urbanisme
  • Code de l’Environnement
  • Loi Alur
  • Loi biodiversité
  • Loi Climat et Résilience

Niveau local

  • Zonage d’assainissement
  • PLU
  • SDAGE et SAGE
  • SCOT

Les réglementations qui intéressent tout particulièrement les collectivités :
Par exemple, le Code Civil stipule que « le propriétaire ne doit pas aggraver l’écoulement naturel des eaux pluviales vers les fonds inférieurs ; le cas échéant une compensation est prévue soit par le versement d’une indemnisation soit par des travaux » (Article 640 et Article 641). Certains articles du Code de l’Urbanisme permettent de refuser une demande de permis de construire qui ne respecterait pas les orientations en matière de gestion des eaux. Évacuation des eaux pluviales réglementation et techniques : consultez la liste (non exhaustive) ici.

Réglementation eaux pluviales au niveau national  

Dans le code de l’urbanisme

Parmi les articles importants du Code de l’Urbanisme et en rapport à l’eau, ceux-ci entre autres vous concernent.  Les loi Alur, loi biodiversité puis loi Climat et Résilience ont apporté plusieurs modifications.

– L’article L111-16 : « Nonobstant les règles relatives à l’aspect extérieur des constructions des plans locaux d’urbanisme, des plans d’occupation des sols, des plans d’aménagement de zone et des règlements des lotissements, le permis de construire ou d’aménager ou la décision prise sur une déclaration préalable ne peut s’opposer […] à l’installation de dispositifs favorisant la retenue des eaux pluviales ou la production d’énergie renouvelable, y compris lorsque ces dispositifs sont installés sur les ombrières des aires de stationnement. Le permis de construire ou d’aménager ou la décision prise sur une déclaration préalable peut néanmoins comporter des prescriptions destinées à assurer la bonne intégration architecturale du projet dans le bâti existant et dans le milieu environnant. »

– L’article L. 111-18 (jusqu’au 1er juillet 2023) : « I.  les constructions et installations mentionnées au II du présent article ne peuvent être autorisées que si elles intègrent soit un procédé de production d’énergies renouvelables, (…) soit tout autre dispositif aboutissant au même résultat et, sur les aires de stationnement associées lorsqu’elles sont prévues par le projet, des revêtements de surface, des aménagements hydrauliques ou des dispositifs végétalisés favorisant la perméabilité et l’infiltration des eaux pluviales ou leur évaporation et préservant les fonctions écologiques des sols. »

Dans le code civil

Les articles 640 et 641 du Code Civil se penchent sur les rapports entre voisins en matière d’écoulement des eaux. 

Celui qui reçoit naturellement (sans intervention humaine préalable) l’écoulement des eaux de la propriété de son voisin ne peut pas bloquer cet écoulement.

Quant au premier, il a la responsabilité de ne pas aggraver l’écoulement. 

Chacun dispose librement des eaux pluviales tombées sur sa propriété, dans la mesure où il n’impacte pas l’écoulement naturel du voisin. En cas de gêne ou d’aggravation, une indemnité devra être versée. 

Réglementation eaux pluviales au niveau local

Quels textes sont réellement contraignants pour vous, à l’échelle de votre projet ?

Évacuation par raccord aux canalisations existantes ou évacuation naturelle (drainage et filtrage), stockage ou rétention : la gestion de l’eau pluviale doit apparaître dans le cahier des charges.

Votre choix de mise en œuvre doit s’accorder aux documents existants au niveau du bassin versant de votre projet. Ces documents sont normalement associés au PLU (voire abordés dans le SCOT dans certains cas).

SADGE et SAGE

Toutes ces recommandations sont appliquées au niveau « régional » dans les documents SAGE et SDAGE (Sdage, schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux). 12 cadres pour les 12 bassins de France métropolitaine et outre-mer. Le SAGE a une portée juridique, il est opposable aux administrations comme aux tiers (maître d’ouvrage).  

Le SADGE dirige et oriente mais, selon le document, il peut aussi se faire contraignant sur les méthodes à suivre. Comme celui d’Artois‐Picardie qui exige l’usage d’une technique. « Dans les dossiers d’autorisation ou de déclaration au titre du Code de l’environnement ou de la santé correspondant, l’option d’utiliser les techniques limitant le ruissellement et favorisant le stockage et/ou l’infiltration, sera obligatoirement étudiée par le pétitionnaire, la solution proposée sera argumentée face à cette option de « techniques alternatives » ».

Assainissement

Au niveau local, le règlement d’assainissement (dépendant du code général des collectivités) et, éventuellement, le règlement d’assainissement pluvial s’il existe. Celui-ci est à consulter au cas par cas, pour une ville, une agglomération ou une collectivité. 

PPRI

Si votre projet d’aménagement se situe sur une zone à risque d’inondation, il devra respecter un certain nombre de mesures. Risques de glissement de terrain ou liés à l’érosion : les solutions d’infiltration dans les sols, de rejet dans un cours d’eau ou de raccordement à un réseau d’assainissement doivent s’étudier plus attentivement.

Code de l’environnement

Pour les projets de grande dimension visés par la nomenclature de l’article R214‐1 du code de l’Environnement (création d’un lotissement, d’une zone urbaine étendue, etc.), le maître d’ouvrage doit déposer un dossier Loi sur l’Eau. Il devra établir toutes les prescriptions à respecter en matière de gestion des eaux dans la réalisation du projet.


Comment savoir si vous devez déposer un dossier Loi sur l’Eau  ? 

Posez-vous ces questions  :

QUI ? – Toute personne physique (particulier) ou morale (collectivité, société, etc.), personne publique ou privée, propriétaire, exploitant ou entreprise.
QUEL TYPE DE PROJET ?  – Toute installation, ouvrage, travaux ou activité, dès lors qu’il peut avoir un impact, direct ou indirect sur les milieux aquatiques environnants. Par « milieux aquatiques », on entend les lacs et cours d’eau en surface, les nappes et eaux souterraines, les zones inondables ou encore les zones humides.
PROJET FINI OU TRAVAUX ?  – Votre projet fini ne doit pas impacter les milieux aquatiques ambiants ? Qu’en est-il de la phase de travaux ou d’exploitation ? La Loi sur l’Eau s’applique à toutes les étapes de votre projet. Considérez donc tous les détails de chaque phase pour ne pas commettre d’impair. Prélèvements, rejets, impacts sur le milieu aquatique, la santé publique et le milieu marin, vous pouvez mesurer votre projet point par point. Pour cela, consultez la liste de la Nomenclature sur l’Eau (soit l’article R. 214-1 du Code de l’Environnement, encore lui). 
N’avancez pas sur votre projet sans autorisation administrative si vous avez le moindre doute. 

Évacuation des eaux pluviales : ce que vous devez retenir

La loi avance lentement. Bien plus lentement que les réalités climatiques qui pressent chaque année nos systèmes classiques d’évacuation des eaux. Le traitement « tout tuyau » a fait son temps. Mais, pour l’instant, les textes ne font que souligner ce fait. S’il est si difficile de s’y retrouver et de savoir quelles sont vos obligations en matière de gestion des pluies… C’est que les eaux se diluent d’un texte à l’autre, sous forme d’encouragement, de mesures prescriptives, etc. À tous les niveaux (européen, national, collectivités, local), les textes parlent de « problématiques d’inondation par ruissellement », de « recommandations », « d’orientations fondamentales d’une gestion équilibrée de la ressource en eau ». Comment, dès lors, faire le tri avec ce qui relève d’une obligation et le non contraignant ? La liste est énorme, vous l’avez sans doute déjà constaté.

Quelle que soit la réglementation sous laquelle tombe votre projet, voici ce que vous devez retenir en matière d’évacuation des eaux pluviales :

  • Il est essentiel aujourd’hui de chercher une alternative à l’évacuation « tout tuyau » ;
  • La plupart des documents d’urbanisme le mentionnent et l’encouragent ;
  • Votre meilleure chance est de travailler sur une gestion des eaux à la parcelle, plutôt que de raisonner en « tout aval » ; 
  • Vous pouvez enfin jouer sur un éventail de solutions d’évacuation des eaux pluviales : infiltration dans les sols, noues drainantes, stockage et rétention dans des cuves, etc.

Pour plus d’informations

Pour mieux comprendre comment ce concept de gestion à la parcelle et éviter les situations comme celle-ci, consultez aussi cet article.

Image de Pierre GEORGEL
Pierre GEORGEL

Passionné de botanique depuis son enfance, a transformé son amour pour les plantes en une carrière florissante. Après des études réussies en horticulture et en paysagisme, il a lancé un projet audacieux à 20 ans : un jardin sur le toit du garage familial. Malgré des débuts difficiles, il co-fonde ECOVEGETAL, qui devient en 15 ans la référence en France pour les jardins sur toits et parkings. Une belle histoire d'innovation et de passion transformées en succès entrepreneurial.

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